Alerte stress ! Industrie ou service, la France doit mener un combat pour retrouver apaisement et motivation de travailler. Les neurosciences proposent de s’attaquer à l’origine du mal pour mieux le combattre.
Aujourd’hui dans les entreprises, tous les indicateurs liés au stress sont dans le rouge vif : 50 % de salariés en stress chronique dont 25 % en hyper stress, un niveau d’engagement au plus bas (moins de 10 % de salariés engagés), un taux d’absentéisme qui ne cesse de croître, chaque jour apporte la confirmation d’une vague de stress sans précédent. Le pic du phénomène est observable pour les femmes, avec de l’expérience professionnelle, à des postes à responsabilités avec un pic dans le secteur sanitaire.
Comment le stress au travail a pris une telle proportion en France ?
Si l’on pose la question aux principaux intéressés, ils vous répondront que la charge de travail (volume, délais à tenir, organisation) est la cause principale, suivie par les problèmes relationnels (hiérarchie, collègue, clients/usagers/patients). Les équipes de direction espèrent toujours qu’un simple déploiement d’outils méthodologiques permettra de résoudre les dégâts de cette catastrophe humanitaire et économique.
Du point de vue des neurosciences, les causes sont plus profondes et doivent nous interroger sur notre rapport au travail — et peut-être même sur notre civilisation.
1- La charge de travail
Les scientifiques ont démontré que notre capacité d’adaptation cérébrale était limitée : Si notre cerveau travaille tout le temps (même la nuit), nous fonctionnons 80 % du temps sur un mode automatique constitué de routines (reproduire les mêmes tâches, les mêmes gestes) et moins gourmand en énergie. Seuls 20 % du temps éveillé peuvent être consacré à des tâches sollicitant notre réelle capacité de réflexion et d’attention via le cortex préfrontal.
Sachant cela, la nature du travail devrait être clairement séparée en 1-tâche de routine et 2-tâches de réflexion et d’adaptation. Les entreprises les plus performantes ont développé massivement la formation pour qu’un maximum de tâches soit réalisé selon des routines/procédures, y compris celles qui demandaient de l’adaptation. Par exemple, chez Starbuck, les salariés sont formés pour répondre à toutes les plaintes des clients.
Si la digitalisation permet d’automatiser les tâches de routine (et non pas d’envahir en informations qui ajoutent encore plus de travail de nature 2), il restera au salarié les tâches de nature 2 – Et alors son temps de travail sera limité biologiquement à 20 % !
2-Les problèmes relationnels
En neuroscience, il est clair que le cerveau humain est un organe qui se construit en relation avec les autres, par l’interaction permanente, jusqu’à l’âge de 20 ans au moins. Un déficit relationnel entraîne de graves séquelles psychologiques. D’ailleurs, lorsque l’on s’intéresse aux peuples premiers (par exemple les Amérindiens nomades), on trouve toujours de petites communautés fortement soudées où l’exclusion est la pire des punitions. Dans le même temps, notre modèle occidental prône un individualisme croissant, y compris et surtout au travail, remisant l’importance de la relation bien loin derrière l’expertise, le statut, la réussite. Cette tendance est juste contraire en tout point à la façon dont nous, êtres humains, sommes construits.
Non seulement les relations humaines ne devraient pas être considérées comme une source de problème mais plutôt comme une source de solutions, grâce à des ateliers spécifiques comme le co-développement par exemple.
Pour cette raison, les organisations qui ont volontairement favorisé les relations humaines ont généralement fait coup double, un meilleur climat social et une meilleure performance économique.
Mieux connaître notre cerveau pour mieux travailler
Finalement, le stress au travail en France est surtout révélateur d’un symptôme, celui d’une méconnaissance totale du fonctionnement de notre cerveau. Se concentrer sur de simples outils méthodologiques revient à mettre un sparadrap sur une jambe de bois. À sur vendre l’idée que l’être humain s’adapte en toute circonstance, on en vient à démontrer que nous sommes biologiquement limités d’une part et que notre façon de travailler nous pousse sans doute désormais au-delà de ces mêmes limites.